Organiser, trier, ranger.
Ce sont de petits gestes simples qui m’apportent beaucoup de calme et me redonnent un certain contrôle sur mon environnement – quitte à ne pas pouvoir contrôler tout le reste.
Dans ma vie, chaque grande peine, déchirante rupture et période de deuil s’est accompagnée d’un ménage en profondeur, ou encore d’une rigoureuse réorganisation. Pour les amant.e.s que l’on perd, ce sont les draps qu’il faut laver en premier! Pour gérer les colères et les frustrations, ce sont les fenêtres qui doivent être exemptes de barioles! On attend les résultats d’un test avec angoisse? Alors, on frotte le plancher. Un déménagement? J’te fais un plan à l’échelle.
Organiser, trier, ranger. Encore.
C’est que voyez-vous, à travers ces manies, il faut tout de même répondre à des questions pratiques : pour les ruptures, changer les draps parait une réponse possédant un semblant de logique. En cas d’intoxication alimentaire, le nettoyage du frigo et de la salle de bain vous semblera sans doute aussi une réponse appropriée!
Or, pour des évènements plus pénibles, plus tortueux, le lien entre ceux-ci et la réponse peut sembler plus ténu. En période de deuil du premier homme de ma vie, qu’est-ce qui peut bien me pousser à nettoyer sous les gros meubles et électroménagers? Ou encore, à épousseter les plafonds et frotter les lattes de stores une par une?
C’est qu’avec les années, j’ai développé une tactique : plus l’évènement est pénible, plus la tâche doit demander à se concentrer. La corrélation est quasi linéaire entre le dérangement occasionné et la complexité de la tâche.
Organiser, trier, ranger. Avec plus d’ardeur.
Pourtant, je ne suis pas la seule comme ça. Quelques personnes autour de moi trouvent le même réconfort dans la cuisine [on les salue], ou encore dans d’autres tâches manuelles [on les salue aussi]!
Tant que ça ne nuit pas au fonctionnement et ne cause aucune souffrance, ça va.
Organiser, trier, ranger. Sans obséder.
Un après-midi, je peux le passer à réorganiser une armoire. Ça ravive parfois des élans de nostalgie qui nous font sourire en poussant un léger soupir, quand on retombe sur une boite remplie de photos et de souvenirs oubliés.
C’est d’ailleurs sur une armoire dans ma chambre que j’ai jeté mon dévolu, la dernière fois que j’ai eu une émotion à faire passer. C’est comme ça que j’ai retrouvé une médaille que m’avait donnée mon grand-père. Ça m’a fait plaisir de la tenir dans mes mains, et je l’ai serrée un instant comme si c’était la chose la plus précieuse au monde, avant de continuer mon ménage. Après, j’ai même décidé de me procurer des paniers et des bacs de rangement, pour mieux m’organiser.
Ce sont des petits paniers que je regarde avec amusement, chaque fois que j’ouvre la porte de mon armoire.
En pliant mon lavage, je tombe sur des vêtements qui ne sont pas les miens. Ça m’fait sourire un peu de les plier, de les avoir dans mes affaires. Puis, j’regarde les paniers un instant, avant d’me décider.
Désormais, la médaille ne sera plus dans l’armoire, mais plutôt dans mon portemonnaie, toujours avec moi. Ça et quelques affaires en moins dans l’armoire, il y a désormais de la place pour un panier avec des vêtements qui ne sont pas les miens.
Organiser, trier, ranger. Puis, avancer.