Se réapproprier notre identité écologique

Date : 26 octobre 2015
| Chroniqueur.es : Laurence Williams
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Le monde actuel étant plongé dans un état critique tant au plan écologique que social, l’immensité et la complexité des enjeux mènent de nombreux passionnés au cynisme, au découragement ou à l’apathie. Joanna Macy encourage quant à elle les humains à transformer la colère et la souffrance que nous ressentons pour la planète en actions concrètes et créatives.

Docteure en philosophie, Joanna Macy s’inspire du bouddhisme et de la pensée systémique pour analyser les dynamiques entre l’être humain et la planète. Elle compare l’ensemble de la vie sur terre à celle d’un immense être vivant au sein duquel nous interagissons de manière interdépendante. La théorie de l’écopsychologie qu’elle a fondée mène à la construction d’une identité commune pour tout être vivant conscient de cette réalité. De l’émergence de cette identité commune naît une transformation personnelle qui est essentielle à la transformation sociale.

Le contexte environnemental et social du 21e siècle justifie la création de cette nouvelle identité, profondément marquée d’une conscience écologique quasi spirituelle. L’activisme environnemental et social ainsi que les initiatives de transition, de communautés résilientes ou de permaculture sont des manifestations de cette identité écologique. Elles témoignent de l’indignation que ressentent des individus envers leur monde en continuelle destruction, et d’une transformation de cette douleur en action.

L’engagement d’un individu au sein de causes diverses devient donc part entière de son identité, mais il est difficile de trouver l’équilibre entre la réaction et la création, entre l’impuissance ressentie face à la souffrance présente dans le monde et son bien-être personnel au quotidien. Comment cultiver le positivisme et le détachement, dans un monde qui nous offre tant de raisons de nous indigner? Est-il possible de dissocier nos engagements sociopolitiques de notre identité profonde?

Joanna Macy soulève qu’il est normal de souffrir avec notre planète des blessures de cette dernière, et que cette compassion est justement une preuve de notre humanité et de notre connexion avec le monde vivant dont nous faisons partie. Elle souligne que l’empathie qu’un individu peut ressentir pour les écosystèmes qui subissent de profondes destructions fait de lui un être plus complet, plus humble, plus vrai. Que cette souffrance peut en fait devenir une force d’action incroyable si elle est bien canalisée.

En ce sens, elle s’oppose à la construction conventionnelle de l’identité, mosaïque habituellement conçue d’un heureux mélange d’instinct de survie, de stratégies de protection, d’un besoin d’exprimer son unicité ou d’acquérir de la reconnaissance. Tous ces concepts étant plutôt reliés à l’ego, Joanna Macy considère cette façon de construire son identité comme étant dysfonctionnelle. Selon elle, cela pourrait même faire partie des causes principales des nombreuses problématiques actuelles : une longue suite de mauvaises analyses et de mauvaises compréhensions de notre rôle à jouer sur la planète, en commençant par la construction de notre identité humaine.

Elle considère cette construction d’une « identité écologique » comme un moment clé dans l’histoire des temps modernes ; le Grand Tournant, qui pourrait mener les sociétés humaines à une réelle prise de conscience face à l’état du monde. Le grand mouvement progressiste actuel regroupe plus de 2 millions d’individus sur la planète qui manifestent leur « identité collective » au sein de différentes causes. C’est en réalisant que nous sommes tous liés et que nous avons besoin les uns des autres que nous réussirons à assurer la transition écologique dont nous avons grandement besoin. Réapproprions-nous notre identité écologique en prenant conscience du pouvoir qui nous habite pour le mettre au service de la vie !

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