C’est par une émission spéciale de grande qualité à 16h 20 le 7 octobre que Radio-Canada a fait un point équilibré sur l’attaque-surprise par les combattants du Hamas sur Israël. Nous reviendrons sur ces entrevues d’une Céline Galipeau un peu dépassée.
D’une part, les vives condamnations unilatérales de l’opération terroriste par les dirigeants occidentaux et leurs propos qu’« Israël a le droit de se défendre », prononcés aussi par la dirigeante européenne Ursula von der Leyen, seraient irréprochables dans leur nature même; mais lorsqu’ils s’adressent au régime d’extrême droite Netanyahou, ils font craindre les pires exactions, prévues par la Turquie et la Russie qui ont essayé de les contrer par leur appel à la modération dans la répression israélienne. On ne pouvait pas compter sur Bob Rae, notre représentant canadien à l’ONU pour les imiter.
L’autre danger est de voir le Hezbollah libanais entrer dans la conflagration, ainsi que son commanditaire iranien — on voyait les Iraniens danser dans les rues à la vue à la télévision de l’attaque palestinienne. Le mouvement Hamas ou Harakat al-Muqanam al-Islamiya connu depuis 1987 (depuis 2002, le Canada le considère comme une entité terroriste) règne sans opposition démocratique sur deux millions d’habitants dont plus du tiers vit nettement sous le seuil de pauvreté. Comment ne pas se révolter quand ils s’entassent dans une région coincée entre Israël, l’Égypte et la mer Méditerranée où les navires palestiniens sont à peu près interdits, une superficie bien moindre que l’île de Laval?
Deux anciens diplomates invités, Ferry de Kerckhove et Jean-François Lépine, ont, malgré leur crainte de voir ces actes de guerre de part et d’autre s’étendre, produit une analyse la plus raisonnée possible. Et le lendemain Raymond Saint-Pierre et Sabrina Myre ont poursuivi ce travail de qualité.
En ressort le constat que nul n’attendait une telle attaque coordonnée et sophistiquée le jour du sabbat qui semble avoir pris par surprise les experts-espions pourtant renommés du Mossad. M. Lépine qui était en poste à Jérusalem lorsque la première intifada a éclaté a blâmé l’inertie israélienne, après le meurtre de leur dirigeant Yitzhak Rabin par un extrémiste de droite furieux des accords d’Oslo, car Israël n’a hélas présenté aucune offre conséquente aux dirigeants modérés de Palestine, laissant le champ libre aux islamistes fanatisés de Gaza, rendus furieusement désespérés par les attaques de colons juifs illégaux auteurs de meurtres en Palestine et restés impunis dans les dernières années.
Les deux diplomates craignent une riposte sanglante de la part d’Israël, qui ne viendra sans doute pas avant que les cinquante-trois otages que le Hamas revendique avoir saisis au cours de leur attaque soient libérés. On connaît le prix qu’Israël accorde traditionnellement aux otages, tant civils que militaires ou policiers.
Au lieu de lancer des anathèmes, les dirigeants occidentaux ne pourraient-ils pas profiter de cette période entre-deux pour tenter une opération sinon de paix, du moins de cessez-le-feu et de suspension des hostilités?
Également sur LCN le matin du 10 octobre on peut entendre une entrevue avec France-Isabelle Langlois d’Amnistie internationale Canada (francophone).
Comme les Artistes pour la Paix, elle condamne l’attaque terroriste du Hamas, un crime de guerre, mais tient à rappeler qu’Israël s’est rendu coupable de telles incursions criminelles en territoires palestiniens. Elle compatit, comme nous, à l’extrême souffrance du peuple palestinien qu’il ne faut pas punir en l’assimilant au Hamas. On est à des années-lumière, a-t-elle poursuivi, d’une solution diplomatique avec une bande de Gaza privée d’eau et de médicaments (les APLP soutiennent l’Organisation mondiale de la santé qui réclame l’ouverture d’un corridor humanitaire) et une Palestine soumise à un apartheid. On compte déjà sept journalistes palestiniens tués, sans compter les bombardements israéliens qui se poursuivent aujourd’hui le 10 octobre sur Gaza, « prison à ciel ouvert », selon la politique ancestrale barbare de l’œil pour œil, dent pour dent.
Enfin, on notera la chronique de Jean-François Lisée dans LE DEVOIR du 10 octobre intitulée La fabrique de désespoir, suivi de commentaires presque unanimes, même le mien !