Alors que notre pays préside le G8 et accueille le G20, les nombreuses controverses et le double discours du premier ministre Stephen Harper nous laissent déjà entrevoir que son manque de volonté politique est bien ce qui pourrait nuire au processus de négociations.
Avec tout le faste déployé pour les deux événements et les scandales qui dévoilent au compte-gouttes les sommes colossales dépensées pour la tenue de ces conférences internationales, difficile de maîtriser sa plume d’autant plus que le gouvernement conservateur apporte de l’eau au moulin.
Parlons franchement, notre beau pays présidera le G-8 (Huntsville) et sera l’hôte du G-20 (Toronto), alors que plusieurs controverses secouent sa crédibilité. Les positions du Canada sur l’avortement, la taxe bancaire internationale et le refus du premier ministre de s’engager plus fermement dans le dossier des changements climatiques nous placent dans une situation plutôt délicate.
Santé maternelle et infantile
La santé maternelle et infantile est un enjeu important pour les droits humains des pays du Sud. En faire un dossier prioritaire contribuerait à réaliser les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Malheureusement, ce sont les objectifs 4 (réduire la mortalité infantile) et 5 (améliorer la santé maternelle) qui enregistrent le moins de progrès depuis le lancement des OMD. Selon OXFAM international, «Chaque année, 350 000 femmes et filles décèdent suites à des complications pendant leur grossesse».
Le gouvernement du Canada s’était d’ailleurs donné pour objectif de mettre en place un plan ambitieux visant à améliorer les soins des mères et des enfants. En janvier, le premier ministre avait surpris en déclarant, à Davos, qu’il ferait de ces questions un thème central du G8.
Des centaines de milliers de femmes et de filles meurent chaque année suite à des hémorragies, des infections, des complications reliées à l’accouchement et des méthodes d’avortement artisanales souvent fatales pour leurs vies. Selon OXFAM international, la majorité de ces populations vulnérables proviennent des pays en voie de développement. Lorsque la décision de ne pas subventionner l’avortement à l’étranger a été rendue officielle, c’est la grogne de l’opposition et la consternation du public qui se sont rapidement manifestées.
Taxe bancaire internationale
Un autre point chaud est la fameuse proposition de taxe bancaire internationale. L’enjeu principal est de mettre à disposition des ressources en cas de crise pour alimenter un fonds de sauvegarde. Il s’agirait de mettre en œuvre des moyens pour responsabiliser les banques face à leurs prises de risques afin qu’elles puissent s’autofinancer, en cas de faillites bancaires.
Les déclarations officielles ont indiqué que le Canada rejetait l’idée de la taxe bancaire sous prétexte que nos banques ont agi de manière responsable et n’ont pas bénéficié du financement de l’État. Au début du mois de juin, on a eu droit à un coup de théâtre lorsque le communiqué de la réunion préparatoire des ministres des Finances a écarté cette question de l’agenda du G-20.
Ce rejet des mécanismes de sauvegarde collectifs est préoccupant. Le Canada, l’Australie, le Japon, le Brésil et l’Inde ont formé une coalition contre cette proposition. Nos partenaires commerciaux, les États-Unis et l’Union européenne, incluant l’Allemagne, la Grande-Bretagne, et la France, s’étaient déclarés favorables à une telle taxe, sans pour autant s’entendre sur les moyens de sa mise en œuvre. Il est inacceptable d’avoir recours à l’argument de «l’intérêt national» surtout lorsque notre pays devrait servir la cause du multilatéralisme quand il accueille un forum international d’une telle envergure.
Environnement et changements climatiques
Après les résultats mitigés de la Conférence de Copenhague, on aurait pu s’attendre à ce que le Canada mette de l’avant les questions environnementales au centre des priorités. Il n’en sera rien. Par des déclarations interposées, le gouvernement conservateur a fait savoir que les questions économiques prendront le dessus et que d’autres forums internationaux sont plus adéquats pour traiter des questions environnementales.
Lors de la récente visite du Secrétaire général de l’ONU à Ottawa, même ses conseils avisés n’auront réussi à trouver une écoute aux oreilles du Premier ministre. Qui pourra lui faire entendre raison? Avec ce jeu du chat et de la souris, espérons que la crédibilité du Canada et son image sur la scène internationale ne seront pas entachées.