Je suis à la veille de la cinquantaine, sans jamais avoir été capable de garder un travail rémunéré pour une longue période de temps. Pour cela, je suis bénéficiaire de la sécurité du revenu depuis longtemps.
Et pourtant, j’ai commencé à travailler à l’âge de neuf ans en aidant mon père dans son supermarché. Je me souviens que mes frères se réjouissaient de pouvoir y réaliser des petites tâches comme épousseter les marchandises dans les étalages ou balayer le plancher. Moi, au contraire, j’y prenais habituellement très peu de plaisir. En réalité, je me sentais rapidement épuisé physiquement et psychologiquement.
Je croyais qu’il me manquait de la volonté pour avoir la même vitalité que mes frères ou mon père. Et pour cela, je me sentais déjà rongé par la culpabilité, voire par la honte de moi-même.
Tout au long de mon enfance et de mon adolescence, je sentais au fond de moi la même fatigue qui parfois dégénérait en forme de dépression sévère, ce qui m’enlevait tout goût d’aller à l’école ou de voir mes amis.
Néanmoins, c’est à l’âge de 22 ans que je suis passé par une sérieuse épreuve en ce qui concerne ma capacité de travail. Je suis allé vivre à Londres, Angleterre, où j’ai habité pendant trois ans. J’y ai travaillé à temps partiel comme serveur tout en étant un étudiant d’anglais à temps plein dans une école de langues.
Je dois dire que j’ai eu un coup de foudre pour l’architecture et par l’offre culturelle de Londres. En même temps, dès le début de mon séjour, le stress de la grande ville, du travail et des études, tout cela me faisait plonger dans la même exténuation mélangée d’une tristesse et d’une irritabilité grandissante.
C’est dans cette période que j’ai commencé à prendre de l’alcool à tous les jours, sinon je ne me sentais pas assez vivant et capable d’aller gagner ma vie avec ma propre sueur.
Heureusement en 2008, à l’âge de 35 ans, après une crise psychotique à Sherbrooke, au Canada, ( j’y ai immigré en 2008 ) j’étais diagnostiqué comme ayant la maladie affective bipolaire. Depuis ce temps-là, j’ai un suivi psychiatrique régulier.
Aujourd’hui à l’âge de 47 ans, j’ai un bon équilibre émotionnel. En effet, je me sens épanoui la plupart du temps: lorsque je respecte mes limites, lorsque je prends ma médication.
Hélas, cette prédisposition à m’épuiser physiquement et mentalement rapidement, qui était présente dans mon enfance, a traversé toutes les étapes de ma vie et perdure encore aujourd’hui.
Et c’est pour mieux comprendre et mieux expliquer ma vulnérabilité au stress, que je me suis mis dans cet exercice d’introspection en écrivant ce texte.
Dans cet exercice, j’ai dû faire face à mon sentiment de culpabilité et à la honte qui me ronge encore d’être en-dehors du marché du travail. J’ai dû aussi faire face à un sentiment d’inutilité qui j’éprouve souvent, même si, dans mon for intérieur, je reconnais que je n’ai jamais été paresseux ou lâche.
Au contraire, je me suis toujours battu à tous les jours dans mon esprit pour ne pas succomber au potentiel autodestructeur de mes émotions exacerbées.
Enfin, je suis conscient qu’il y a beaucoup de gens qui sont bénéficiaires de la sécurité du revenu qui ont une problématique du moins semblable à la mienne.
Pour cela, je voudrais vous inviter à nous connaitre d’avantage pour ainsi nous accueillir au sein de la société avec notre constitution physique et psychologique qui est propre à chaque individu.