Le Québec en route vers sa première constitution : quel rôle pour les citoyens?

Date : 1 janvier 2025
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Depuis quelques années, la question d’une constitution québécoise prend de plus en plus de place dans les médias et sur la scène politique. Ce sujet, autrefois réservé à des cercles d’experts et d’universitaires, suscite aujourd’hui un intérêt grandissant auprès de la population et des acteurs politiques. Mais au-delà de l’effervescence, deux visions diamétralement opposées s’affrontent quant à la manière d’élaborer cette constitution.

Le courant légaliste

L’approche qui semble dominer dans les cercles politiques et juridiques actuels propose une démarche essentiellement mécanique. Son objectif principal est de codifier et regrouper les lois et textes existants ayant une portée constitutionnelle, tels que la Charte des droits et libertés du Québec, la Loi 99 sur l’autodétermination et la Loi 101 sur la langue française.

Il s’agit avant tout d’un travail technique et administratif, visant à moderniser le cadre légal du Québec sans remettre en question les structures fondamentales du pouvoir. Ce processus, généralement réservé à un cercle fermé d’experts et de décideurs, se limite à ajuster les règles existantes dans un cadre parlementaire, avec parfois l’ajout d’éléments républicains.

Le problème fondamental de ce processus est qu’il ne corrige en aucune manière le fait que la population du Québec n’a jamais été consultée ni prise en compte à aucun moment de son histoire dans aucun des régimes du passé. Le système actuel n’est que la suite d’une série de systèmes qui, chaque fois, ont été décidés sans consultation ni implication de la population.

L’ACCQ : une voix pour la démocratie participative

L’Association pour une Constitution Citoyenne du Québec, issue d’une série de rencontres ayant débuté en 2014, est née du désir de doter le Québec d’une véritable constitution, un texte issu du peuple et pour le peuple. Depuis sa création, l’ACCQ milite pour un processus ouvert et inclusif, basé sur une participation citoyenne élargie.

La mission de l’ACCQ est de promouvoir, de préparer et de provoquer la convocation d’une Assemblée constituante citoyenne non partisane, totalement libre dans ses délibérations, ayant pour mandat la rédaction d’une Constitution par et pour le peuple.

Cette assemblée, composée de citoyens représentatifs de toute la diversité québécoise, choisis idéalement par tirage au sort, aurait pour mandat de rédiger une constitution sans restrictions imposées par les élites politiques ou juridiques. Loin de vouloir dicter un résultat précis, l’ACCQ croit fermement que les Québécois eux-mêmes doivent définir le contenu et la portée de leur constitution, qu’il s’agisse du système de gouvernance, des droits fondamentaux ou même de la relation entre le Québec et le reste du Canada.

Le plan d’action de l’ACCQ

Face à cette vision légaliste, l’ACCQ propose un plan d’action en cinq étapes (disponible sur son site internet). La création d’une constitution doit être un projet de société, une occasion unique de redéfinir les valeurs, les institutions et les aspirations collectives du Québec.

La mise en place de cette assemblée doit donner une latitude maximale aux participants, leur permettant de réfléchir librement aux grands enjeux du Québec. De plus, ce processus inclusif garantirait une représentativité de tous les groupes de la société, renforçant ainsi la légitimité du document final.

Pour atteindre cet objectif, l’ACCQ mène des campagnes de sensibilisation, organise des événements publics et collabore avec des organisations partageant la même vision. Elle travaille également à inscrire la question d’une assemblée constituante citoyenne dans le débat public, notamment en vue des prochaines élections provinciales.

Portée et impact

Beaucoup de citoyens peuvent considérer que la question d’une constitution est un exercice futile et que la société a de nombreux problèmes plus importants à régler. Mais que ce soit sur la question du logement, de l’immigration, de la santé, de la qualité de vie ou de l’environnement, toutes ces questions sont condamnées à être en perpétuel débat parce qu’aucun de ces points ne fait partie de la constitution actuelle. Par conséquent, ces enjeux peuvent constamment être reportés ou déviés par les gouvernements.

La rédaction d’une constitution est le moyen le plus concret et puissant pour incruster des valeurs fondamentales comme le droit au logement, à un environnement sain, à une éducation appropriée, et faire en sorte que les gouvernements, peu importe leur idéologie, soient tenus de remplir ces mandats.

Un enjeu électoral incontournable

À mesure que le projet d’une constitution québécoise gagne en visibilité, il devient clair que ce sera un enjeu des prochaines élections provinciales. La question n’est plus de savoir si le Québec aura une constitution, mais comment ce processus sera mené.

Le Québec est résolument en route vers sa première constitution. Reste à savoir si ce texte fondateur portera réellement l’empreinte des Québécois ou s’il deviendra un simple exercice administratif sans effet réel sur les citoyens.

 

 

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