À mi-chemin entre l’Europe et l’Asie, la plus grande ville du Qatar, Doha, sera l’hôte du prochain sommet sur le climat de l’ONU. Du 26 novembre au 7 décembre prochain, des milliers de délégués sont attendus pour prendre part à la 18e Conférence des Parties à laquelle participeront des étudiants de l’Université de Sherbrooke.
Le projet en est à sa troisième édition et est né d’une volonté de faire le pont entre la théorie et la pratique, de permettre aux étudiants de mieux comprendre la complexité des négociations climatiques internationales, et de faire des étudiants des acteurs de changement face à cet enjeu qui est sans doute le plus grand défi auquel nous aurons à faire face au XXIe siècle.
L’objectif, pour les initiateurs de l’activité, Annie Chaloux et Hugo Séguin, chargés de cours à l’École de politique appliquée, est à la fois de contribuer à la formation d’une nouvelle génération de praticiens et d’accroître l’expertise de ceux-ci sur des questions internationales fort importantes, actuellement et pour l’avenir.
Quant aux huit étudiants qui forment la délégation, ils étudient en politique, en droit, en environnement et en économie, mais partagent tous un grand intérêt pour les négociations internationales sur le climat. En équipe de deux, ils réaliseront un projet de recherche sur différentes thématiques en lien avec les changements climatiques dans le cadre de la conférence de Doha.
En vue de la conférence de Doha, les membres de la délégation se préparent en participant à des séminaires sur plusieurs thèmes en lien avec les négociations internationales sur le climat. Ils travaillent aussi à la collecte de fonds, à l’organisation logistique du voyage et aux communications et relations médiatiques.
Enjeux de négociations
La conférence qui s’ouvrira à Doha ne sera pas la première, et encore moins la dernière, dans les négociations internationales sur le climat. Chaque année, plusieurs sessions de négociations ont eu lieu (Bonn, New York, Bangkok) avant de culminer avec une grande conférence comme l’ont été celles de Copenhague, Cancún ou, plus récemment, Durban à la fin 2011.
À Durban, les États n’ont pas réussi à écarter le monde d’un scénario climatique dangereux où le réchauffement planétaire serait limité à 2 °C. Si les pourparlers ont échoué en 2011, ce n’est pas par manque de structure de négociations, mais plutôt par absence de leadership ou de volonté politique. Le bloc formé par l’Union européenne, les petits États insulaires et les pays les moins développés a néanmoins permis d’éviter la catastrophe en sauvant le Protocole de Kyoto.
Pour l’heure, les parties ont conclu qu’un instrument quelconque devra être créé le plus rapidement possible, avec 2015 comme date butoir. Si les États arrivent à respecter cet échéancier, il a été décidé que cet instrument devra entrer en vigueur et être mis en place à compter de 2020.
Avec l’échéance de Kyoto à la fin de l’année, les objectifs et défis de la conférence de Doha sont de taille. Un des éléments les plus cruciaux est d’élever le niveau d’ambition et de dresser une voie à suivre pour conclure un accord juste et contraignant au plus tard en 2015.
L’accord de Doha devrait entre autres établir des cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre, préciser les responsabilités des pays émergents et développer une structure de financement du fond vert. En ce qui a trait aux cibles de réduction, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) est clair : les émissions doivent être réduites de 50 % à 80 % par rapport aux niveaux de 1990 d’ici 2050. Ces réductions des émissions de gaz à effet de serre permettraient tout juste de limiter le réchauffement planétaire en deçà de la limite dangereuse du 2 °C.
Aussi, comme ce fut le cas l’an passé à Durban, les petits États insulaires, les pays en développement et les pays africains mettront l’adaptation à l’agenda des négociations. L’adaptation touche aux mesures et politiques pour réagir aux impacts inévitables des changements climatiques. Plusieurs éléments cruciaux demeurent à préciser dont les sources de ce financement, la gestion et l’allocation des fonds.
De manière plus large, la question de la prolongation du protocole de Kyoto et surtout ses modalités est cruciale. Kyoto a été sauvé à la conférence de Durban en 2011, mais les plus grands pollueurs sont absents de l’entente. Entre insouciance, déni et hypocrisie, on se rappelle encore douloureusement du retrait canadien de Kyoto au lendemain de la clôture des négociations de Durban. Mais le Canada n’est pas le seul. Les pays émergents, les États-Unis, l’Australie et l’Union européenne devront faire preuve de leadership afin de faire progresser les négociations tant au niveau de l’atténuation que de l’adaptation ou du financement.
Si la voie de Kyoto n’est pas retenue pour encadrer les efforts futurs de lutte aux changements climatiques, la plate-forme de Doha pourrait s’avérer être une alternative au blocage actuel. Ceci dit, le temps presse et il faut incontestablement accélérer le rythme. Bref, les obstacles politiques sont grands, mais les solutions sont nombreuses et les innovations se multiplient. Et puis le rôle de la société civile, des jeunes en particulier, est de stimuler et de faire pression sur les décideurs politiques pour faire avancer les négociations.
Les auteurs sont membres de la délégation 2012 de l’Université de Sherbrooke à Doha. Pour soutenir le projet ou pour toute autre information, communiquez avec eux par courriel à doha_2012@usherbrooke.ca ou sur Facebook à UdeSDoha.