Répertoire des villes disparues, comme plusieurs autres films, a d’abord été une œuvre littéraire. En effet, le film est une transfiguration libre du tout premier roman du même nom publié en 2015, de la jeune auteure Laurence Olivier. C’est Denis Côté qui réalise le film, le même qui nous avait offert Curling (2010) et Boris sans Béatrice (2016). Le film a également bénéficié des talents de Laurence Olivier pour l’écriture du scénario.
Première des choses, comme dans plusieurs adaptations, il y a le livre et le film. Ce sont deux entités différentes, deux histoires, mais avec quelques similarités. Ceux qui ont aimé le livre n’aimeront pas nécessairement le film et vice-versa. Le livre, pour sa part, a sa poésie, ses réflexions, ses scènes avec peu de dialogues. C’est un livre qui est également court, avec peu de texte, laissant de grands espaces vides. Un livre qui en dit beaucoup, mais avec peu de mots. Le film pour sa part a également sa poésie et ses réflexions, mais beaucoup de dialogues ont été ajoutés, ainsi que des personnages supplémentaires, voire superflus. Il y a quand même cette idée de vide qui a été retenue, avec ses longs silences et ses paysages hivernaux, qui envahissent l’espace par leur blancheur, comme la blancheur des pages qui prennent davantage de place que le texte dans le roman original.
Il y a également cette histoire de mort, qui dès le début du récit, viendra teinter tout le reste, dans ce petit village fictif, nommé Irénée-les-Neiges. Un malaise qui vient secouer toute la population d’un peu plus de 200 habitants, dans une communauté tissée serrée, particulièrement 10 d’entre eux. En effet, nous suivons ces 10 personnages, affectés par le drame qui leur tombe dessus. Il n’y a pas que cet événement qui prend toute la place, mais également l’arrivée de présences hostiles, ni fantômes, ni morts-vivants, qui dérange. Des thèmes comme la mort sont abordés, mais la xénophobie également.
Contrairement au roman initial, le film flirte avec un côté fantastique et surnaturel, se rapprochant dangereusement du film de genre. Cette ambiance glauque aux couleurs désaturées traduisait bien une certaine poésie, jusqu’à ce que le tout soit gâché par cette scène d’assemblée de village où l’on veut tout donner les clés au spectateur et ainsi, briser un certain mystère. Il y a aussi cette fin, abrupte, nous laissant en reste sur notre appétit, qui ne saura plaire à tout le monde. L’utilisation du 16 mm, avec son grain et ses imperfections, s’arrime parfaitement avec l’ambiance du film. Il saura combler les cinéphiles nostalgiques de la pellicule, avant que le numérique vienne envahir tous nos cinémas. La caméra en mouvement vient également ajouter à l’ambiance inquiétante, de ce petit village isolé.
Parlons de ces acteurs et actrices. Nous retrouvons donc les dix personnages, joués par Robert Naylor, Diane Lavallée, Larissa Corriveau, Josée Deschênes, Jean-Michel Anctil, Rémi Goulet, Normand Carrière, Rachel Graton, Hubert Proulx et Jocelyne Zucco. Dix personnes talentueuses, incarnant ces villageois torturés. Tous sont justes et crédibles. Cela fait un bien fou de voir le côté dramatique de Diane Lavallée, de Josée Deschenes et de Jean-Michel Anctil. On est bien loin des personnages de La Petite Vie et de Râteau. Anctil nous avait montré de quoi il était capable précédemment dans Nous sommes les autres (2017). L’étoile du match revient par contre à Larissa Corriveau, une comédienne de talent à découvrir.
Répertoire des villes disparues n’est pas un film accessible pour tout le monde. Sans être un film inaccessible, il a son propre univers et ses propres codes de l’étrange. On ne pourra reprocher par contre à Denis Côté de ne pas être aventureux et audacieux dans son cinéma.
Le film est présentement disponible à La Maison du Cinéma :
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