À l’automne 2017, en pleine campagne électorale municipale, la Collective Sherbrooke Féministe organisait une marche exploratoire au centre-ville où elle dénonçait le manque de représentativité des femmes à Sherbrooke, notamment au niveau des toponymes. Si l’on se fie aux récents propos tenus par le président du Comité de toponymie de la ville, un an plus tard, cette tendance n’est pas en train de changer ou du moins, trop peu rapidement. Combien de fois faudra-t-il encore aborder ce sujet pour qu’il y ait des changements concrets?
En 2015, 54% des noms des 1700 rues de Sherbrooke étaient en lien avec une personnalité. De ce nombre, 11% étaient des noms de femmes et 89% d’hommes. Les femmes composaient seulement 6% des noms de rues dans toute la ville! Comme la majorité des noms sont tirés de la sphère publique, les femmes y sont peu représentées, car elles n’y avaient historiquement pas accès. Les toponymes choisis ne sont pas seulement des noms de rue. Ils sont le reflet de notre société passée et actuelle ainsi que des gens qui y ont contribué. Ce que démontre Sherbrooke en ce moment, c’est que les femmes n’en font pas partie. Au lieu de trouver des thématiques équestres ou florales pour pallier au manque de toponymes féminins, pourquoi ne pas aller chercher ailleurs pour représenter les femmes équitablement? Le comité de toponymie de la ville, composé uniquement de représentants masculins (actuellement), semble à nouveau manquer de jugement et de vision.
Par exemple, Montréal a créé la Banque Toponym’Elles, un site interactif au sein duquel la population est invitée à proposer des noms de femmes qui ont marqué l’Histoire de la ville, à petite ou grande échelle, afin de rectifier le tir dans la toponymie municipale. L’objectif de la démarche est simple : que la représentation des femmes dans l’espace public soit égalitaire, une valeur importante pour la Ville.
On pourrait penser que Sherbrooke est sur la bonne voie avec l’adoption d’une Politique de rédaction épicène, la création d’un sous-comité Femmes, la nomination de trois femmes au conseil exécutif et une composition presque paritaire au Conseil municipal. Force est de constater qu’elle doit changer de cap rapidement au niveau de sa toponymie pour pallier aux inégalités grandissantes des représentations féminines dans la ville. Même si l’Histoire a effacé plusieurs femmes, nous ne sommes pas collectivement tenu-e-s de faire la même chose.
Sarah Beaudoin et Marie-Danielle Larocque
Citoyennes, membres de la Collective Sherbrooke Féministe