PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN FEU
CÉLINE SCIAMMA, 2019
Dans ce film, tout est beau : la symétrie des plans, la vivacité des couleurs, le jeu des actrices, la musique il n’y a que trois chansons, mais wow !
Quelque part à la fin du XIIXe siècle, la peintre Marianne est engagée pour réaliser le portrait de mariage d’Héloïse, qui refuse d’être peinte. Au cours du processus, on sent monter la révolte contre le mariage arrangé, ainsi que le désir qui grandit chez deux protagonistes. Leurs interactions entre elles, mais aussi avec la servante Sophie, sont d’une profondeur grandiose et passent le test de Bechdel haut la main. On y traite de thèmes résolument féministes, dont la liberté de choisir, sous toutes ses formes. Parmi mes scènes préférées, il y a d’ailleurs ce moment où elles se retrouvent toutes les trois seules à cuisiner, laissant tomber les rôles de classe et de genre. Avec une équipe de tournage principalement féminine, on a la preuve que les principes féministes font de l’excellent cinéma, ce drame lesbien étant l’un des meilleurs films que j’ai vu au cours des dernières années !
KUESSIPAN
YRIAM VERREAULT, 2019
Inspirée du livre du même nom écrit par Naomi Fontaine (qui a d’ailleurs co-scénarisé le film), cette oeuvre est d’une qualité remarquable. Sur fond de paysages de la Côte-Nord entre Sept-Îles et la communauté innue d’Uashat-Maliotenam, entre les musiques composées par Louis-Jean Cormier [lui-même natif de cette région du Québec] et les silences, on y découvre une communauté tissée serrée et le sisterhood qui lie deux amies de toujours, malgré le drame et les défis. Un portrait cru et sensible d’une communauté qui se balance entre traditions et modernité, guidée par la solidarité mais toujours hantée par un passé jonché d’évènements sombres dont on peut voir les traces encore aujourd’hui.
La majorité des actrices et acteurs présents dans Kuessipan, [qui signifie Ton tour, en innu] dont les deux protagonistes, sont des non professionnels et en étaient à leur première expérience à l’écran. Peut-être que l’authenticité de leur jeu contribue à faire de ce film une oeuvre si renversante. Définitivement à voir et à revoir !
TERRA FIRMA
TASH SULTANA, 2021
Après ses débuts fulgurants en 2016 avec le single « Jungle » (enregistré dans son appartement dans son Australie natale), et le succès de son premier album studio « Flow State » (lauréat du Meilleur Album Blues/Folk en 2018 au ARIA Awards) les attentes sont grandes pour son 2e album, paru en février 2021.
Ce 2e album est délibérément différent. La pièce instrumentale « Musk » est une introduction colossale à un album où tout est le bienvenu. Cette pièce originale, tachetée de joyeux éclats de trompette, pourrait bien être la bande sonore d’une fête organisée par Tame Impala.
Le funk grinçant de « Greed » agit comme une déclaration d’intention, avec Sultana mettant son propre bonheur au détriment de l’argent à la banque (« Je me suis bien débrouillé en ne travaillant pas pour cet homme »). Un message qui fait écho à la pièce de clôture « I Am Free » (« Vous n’avez pas besoin d’argent pour être heureux. Non, vous pouvez simplement être libre ») et une conviction qui est au coeur de chaque piste en roue libre.
*Nous avons reçu de nombreuses questions sur le titre de cette chronique culturelle, voici l’explication tirée du Wiktionnaire:
(il y a) à boire et à manger: se dit d’une question qui présente deux sens, d’une affaire qui peut réussir ou ne pas réussir, d’un ouvrage où il y a du bon et du mauvais.