Avec Premiers soins, son premier recueil de poésie publié aux Écrits des forges, David Goudreault, le champion de la Coupe du monde de slam poésie à Paris en 2011, prouve aux plus snobs d’entre nous qu’il sait faire la différence entre écrire en tant que poète et écrire en tant que slameur. On aura beau vouloir dire que le slam représente la nouvelle poésie ; personnellement, il reste que les jeux de mots faciles – quoique souvent très brillants – assonances et allitérations ne m’ont jamais séduite autant que la subtilité des poèmes.
Dans Premiers soins, le poète trifluvien a su donner à chaque mot son plein sens ; sa valeur quotidienne doublée de la quintessence de l’imaginaire. Le ton est tendre et ironique, avec un brin d’humour, mais le sujet est sérieux : le mal-être existentiel, le désespoir humain, celui qui ressemble à « L’envie de mourir […] Plus pressante que l’envie de pisser ». Un choix s’impose alors au poète : « Me retenir ou me mourir dessus ». Or, David Goudreault n’est pas un poète maudit, et c’est tant mieux ! Il choisit plutôt d’écrire une poésie qui a « L’espérance encrouée à sa prothèse ».
Le travail d’édition est très bien fait et rien n’est laissé au hasard. Le choix des titres est juste et l’univers d’un poème dresse celui du suivant ; les quatre parties suivent une belle évolution et rendent compte des différents états psychiques liés à chaque étape de la guérison : l’urgence, le diagnostic, le traitement et la rémission.
À mon sens, une des plus belles réussites de ce recueil est la compassion que développe le poète à l’égard du malheur des autres. David Goudreault comprend que pour guérir il faut s’extirper de son propre malheur : « La guérison est dehors / La santé c’est les autres » […] « Je m’accroche à bout de bras brisés / Aux souffrances communes ». En fait, il semble même que l’Autre devient le véritable déclencheur de la guérison du poète : « Dans la chambre adjacente / Une histoire bien pire / Si pire qu’elle donne de l’espoir ».
Enfin, comme s’intitule l’un de ses poèmes qui met en scène une femme au grand cœur, je dirais que David Goudreault a « De la vocation » en tant que poète.