Nous voyons depuis le début du mouvement de grève étudiante le gouvernement et ses alliés comme la crépuq nous rebattre les oreilles que la seule alternative à la hausse des frais de scolarité est l’augmentation des impôts pour la classe moyenne et que puisque cette dernière contribue déjà largement au financement des universités, il ne reste qu’aux étudiantEs à faire leur « juste » part. Il n’y aurait donc que deux possibilités pertinentes envisageables !
Pour ce qui est du terme « juste » employé par la propagande gouvernementale, le choix d’associer la « juste » part demandée actuellement aux étudiantEs à celle de 1968 n’est pas du tout désintéressé et est hypocrite. Cette année de référence correspond à une époque où le système d’éducation universitaire québécois était encore sous-développé, de petite taille, élitiste et relativement peu coûteux pour l’État. C’est à partir de 1969 que l’investissement public a accru de façon importante, notamment en créant le réseau des Universités du Québec, en développant les petites universités privées de l’époque (dont l’UdeS), en instaurant le système collégial, etc. Il n’est donc pas étonnant qu’à partir de cette date la part étudiante dans le financement total des universités ait diminué en proportion, et non en valeur réelle (en tenant compte du coût de la vie et de l’inflation).
Ce qui me préoccupe à l’heure actuelle c’est la tentative du gouvernement et de ses alliés de tromper la population en opposant la classe moyenne aux étudiantEs. Le sophisme qu’ils ont fabriqué consiste à dire que si les étudiantEs ne paient pas la hausse demandée, ce sera nécessairement la classe moyenne et l’ensemble des travailleurs et travailleuses qui la paieront. Le cadre discursif est donc présélectionné d’avance par le pouvoir et la propagande médiatique n’a qu’à marteler toujours le même message.
Évidemment, plusieurs voient immédiatement la tromperie dans la fausse opposition de la classe moyenne aux étudiantEs. Mais pour une partie de la population moins instruite ou moins vigilante, le sophisme peut fonctionner. Nous le constatons dans certains commentaires dans les tribunes libres ou sur internet. Des travailleurs et travailleuses de la classe moyenne qui sont déjà comprimés économiquement et fiscalement au maximum et qui voient les revendications étudiantes comme une menace qui plane sur eux. Pourtant les propositions étudiantes n’ont jamais porté sur l’augmentation du fardeau fiscal de la classe moyenne. Au contraire, c’est la hausse des frais de scolarité qui constitue une restriction économique supplémentaire à la classe moyenne !
Il y a tellement d’autres possibilités valables pour financer adéquatement nos universités sans nuire à l’accessibilité aux études, sans augmenter l’endettement étudiant et sans s’en prendre encore une fois à la classe moyenne.
Tout d’abord, il y a la mauvaise gestion universitaire qui pourrait être éliminée et qui nous ferait économiser des millions. Nous n’avons qu’à penser au projet de l’Îlot Voyageur, au condo de luxe du recteur de Concordia payé aux frais des contribuables, aux augmentations salariales faramineuses accordées aux recteurs/rectrices et aux membres des directions universitaires, etc. Les exemples de mauvaise gestion et de dépenses/investissements douteux de la part des universités pullulent et elles touchent l’ensemble de ces dernières, pas seulement l’UQAM ou Concordia.
L’UdeS ne fait pas exception à la règle. Que l’on pense à l’achat il y a quelques années du Vieux Clocher de Sherbrooke au coût de 1 million de dollars (alors qu’il avait été payé par son ancien propriétaire environ 100 000 $) alors que le Centre culturel de l’UdeS est déficitaire depuis des années, et ce en plus du fait que des journalistes (La Tribune entre autres) ont fait ressortir dernièrement qu’il se pourrait que le Vieux Clocher soit obligé de fermer pour des vices de bâtiment qui font que ce dernier ne répondrait pas aux normes de sécurité en vigueur ! Que l’on pense au campus de Longueuil construit au coût approximatif de 300 millions qui devait au départ posséder deux tours et qui n’en possède finalement qu’une (évidemment au même coût) et qui, selon certaines sources, n’est occupé que partiellement (bien qu’il le soit entièrement sur papier) ! Que l’on pense à notre rectrice qui a le droit à un chauffeur privé pour ses déplacements.
Ensuite, il y a l’abolition en 2009 par ce cher gouvernement libéral de la taxe sur le capital des institutions financières qui nous prive collectivement depuis ce temps d’environ 800 millions par année ! Il pourrait y avoir au seul rétablissement de la situation d’avant 2009 amplement d’argent pour augmenter le financement de nos universités (en s’étant assurés d’abord d’un contrôle rigoureux public et transparent de ces dernières) et pour financer la gratuité scolaire à l’université. Les banques ne délocaliseront pas au Mexique !
De plus, une réforme de la fiscalité québécoise pour rétablir un véritable système progressif permettrait à la fois de baisser les impôts de la classe moyenne en général (autour de 80 % des contribuables selon la réforme envisagée) et d’augmenter les revenus collectifs de plusieurs centaines de millions (le chiffre exact varie quelque peu selon les études).
Sans compter qu’une augmentation des redevances sur nos ressources naturelles pourrait ici aussi nous rapporter plusieurs centaines de millions tout dépendant évidemment du système adopté. Il n’y a à peu près que les libéraux et, bien sûr, l’industrie minière, pétrolière ou gazière qui sont confortables avec le pillage actuel de nos ressources !
Bref, des possibilités, il y en a bien plus que deux, sans compter que celles que je viens d’exposer brièvement ne sont pas les seules, loin de là. Il ne s’agit donc que de volonté politique, d’un peu d’imagination et de travail rigoureux pour l’établissement de politiques sociales et économiques réellement progressistes !