Qui aurait cru que l’approche de la période des Fêtes amènerait une remise en question?
De par l’impact de notre consommation sur notre empreinte écologique, les méfaits des changements climatiques exigeraient-ils d’aller vers la décroissance? Est-ce qu’il y aurait là un conflit entre perpétuer les traditions et effectuer un changement qui concorde avec de nouvelles valeurs? Je m’interroge sur la place de la consommation à Noël, bien que je souhaiterais continuer à signifier mon amour aux miens.
Cadet (ou «enfant sandwich») d’une famille de trois enfants, j’ai été éduqué aux valeurs judéo-chrétiennes typiques de certaines familles québécoises. Sensible au bien-être des gens qui m’entourent en tant que père de deux adolescents, avec des neveux et nièces, des amis et une copine, j’aime souligner mon appréciation de leur présence sur une base régulière, plusieurs fois dans l’année, à petite dose et de façon plus marquée lors d’occasions spéciales: anniversaire, Noël, etc. Mais, je viens de me rendre compte avec le contexte actuel que je suis confronté à un profond dilemme; quoi faire pour souligner Noël?
Non pas que je manque de moyens, j’ai un travail motivant avec une situation financière qui me permettrait de dépenser jusqu’à m’endetter. Mais, le questionnement reste entier, ai-je envie de continuer à consommer pour des cadeaux ou j’envisage cela autrement dans le souci de la préservation de l’environnement?
Le sens premier de cette fête judéo-chrétienne est de souligner la naissance du messie et celle-ci est devenue un moment de réjouissance avec la famille et les amis… avec un aspect beaucoup plus mercantile!
En regard à notre consommation pour Noël, on peut se questionner sur l’impact de ces réjouissances sur notre portefeuille et sur l’environnement. En 2017, Ianik Marcil de Radio-Canada a rapporté qu’en moyenne les adultes prévoyaient dépenser plus de 1500$ pour les Fêtes. Soit 615$ consacrés aux cadeaux, 675$ aux voyages et 210$ en sorties et loisirs. Vite comme ça, ce 615$ de cadeaux équivaut à plusieurs épiceries d’une famille de quatre personnes, non? Surtout, si notre épicerie hebdomadaire ne nous coûte que 75$!
Comment situer tout cela dans une possible diminution de notre empreinte écologique? Avec la décroissance?
Ayant émergé dans les années 1970, le mouvement de la décroissance est un concept à la fois politique, économique et social, selon lequel la croissance économique apporte davantage de nuisances que de bienfaits à l’humanité. Il est intéressant ici de noter que ce concept avait été avancé par certains auteurs critiques de la révolution industrielle du 19e siècle, avec Murray Bookchin, Pierre Kropotkine et Léon Tolstoï notamment.
Inquiet de la progression du Jour de dépassement de la Terre, cela m’a frappé de découvrir que celle-ci se devançait à chaque année. Calculée par l’ONG américaine Global Footprint Network, cela correspond à la date de l’année à partir de laquelle l’humanité a consommé l’ensemble des ressources que la planète est capable de régénérer en un an. Passée cette date, l’humanité puiserait de manière irréversible dans les réserves non renouvelables (à échelle de temps humaine) de la Terre.
L’overshootday.org indique dans les années 80, le Jour de dépassement était début novembre, puis maintenant cela s’établit au début du mois d’août! Même si certains scientifiques, citoyens, politiciens critiquent (à tort ou à raison) cet indicateur du Jour du dépassement, l’essence ou l’esprit de cette méthodologie demeure probablement utile pour nous sensibiliser à notre surconsommation.
Ne plus donner de cadeaux? Rien n’oblige à donner des cadeaux à Noël, certains le font peut-être déjà! Bien que cela reste une bonne façon de réduire notre impact sur l’environnement. Par contre, on s’expose au jugement des autres…
Donner des cadeaux recyclés faits soi-même? Bien que cela ne sera pas facile de fabriquer une tablette électronique ou une console de jeux avec restant de tuyau de plastique et fils de cuivre! Pourquoi ne pas penser faire une sortie (au musée gratuit le 1er dimanche du mois), d’offrir des plats faits maison ou de profiter d’activités de plein air en famille. Cette dernière option, je l’ai personnellement essayée à quelques occasions et elle est très intéressante, excepté pour le défi qu’à mesure que la «famille» s’agrandit, ce n’est pas facile de concilier les goûts et les disponibilités de tout le monde.
Poursuivre dans l’achat de cadeaux? Même si M. Marcil notait que les biens semi-durables, qui comprennent les cadeaux comme les vêtements, les petits appareils ménagers ou les jouets, auraient ainsi augmenté de 45% depuis 60 ans. Il semble donc y avoir des alternatives au traditionnel achat de cadeaux.
Je ne suis certainement pas le seul à avoir remarqué que certains produits sont de moins en moins durables, que ce soit en raison d’une obsolescence technique réelle ou contrôlée, ou une obsolescence psychologique qui nous incite à acheter le dernier téléphone intelligent à la mode… parce que son écran mesure 2,4 mm de plus, wow! Il me semble qu’on pourrait voir autrement…
Je pourrais déjà en parler au prochain souper de Noël, comment les gens verraient cela? Peut-être leur dire que la préservation de la planète est aussi un acte d’Amour, surtout pour ceux qui nous suivront. Recevoir une «expérience à partager» est aussi un beau cadeau. Offrir du temps, cela ne reste-t-il pas ce que l’on a de plus beau à offrir?