On comprend très bien les journalistes d’être vivement choqués par l’assassinat de manière barbare de leur collègue Jamal Khashoggi dans une ambassade (!) en Turquie. Mais l’attention internationale doit se réserver un gros morceau d’indignation pour la sauvage guerre menée par l’Arabie saoudite, bonne alliée du Canada, contre le Yémen. Selon UNICEF, qui a besoin de nos dons, deux millions d’enfants y souffrent de malnutrition aiguë, 54% des centres de santé n’y sont plus en état de fonctionner et seize millions de personnes, dont plus de la moitié d’enfants, sont en danger de mort, sans accès à de l’eau potable ni par conséquent à une hygiène minimale de base.
Le Canada a vendu à l’Arabie saoudite des blindés de General Dynamics Ontario négligemment qualifiés de «jeeps» par Justin Trudeau à Tout le monde en parle. Réinvité dimanche le 21 octobre dernier, il a dit «ne pas exclure l’annulation de la vente d’armes». Sa décision semble toujours reportée, alors que le même jour, la conservatrice chancelière Angela Merkel suspendait les exportations d’armes allemandes vers l’Arabie saoudite.
La complicité canadienne avec les bombardements de l’OTAN en Libye en 2011 en conquête du pétrole (pour lequel on achète au pays un pipeline à 4,5 milliards de$) aggrave le nombre de réfugiés, à 68,5 millions selon le Haut-Commissariat des Réfugiés (ONU).
Dès février 2014, les Artistes pour la Paix dénonçaient le ministre conservateur des Affaire$ Étrange$, John Baird et son contrat de 15 milliards de$ à un pays guerrier, le dernier au monde pour les droits des femmes, parmi les derniers pour les droits des homosexuels (LGBT), ainsi que pour le droit d’exercer une religion autre que wahhabite et où toute opposition à la royauté est passible de mort; ou de coups de fouet, comme l’a appris Raïf Badawi qui croupit encore en prison pour de simples écrits appelant à plus de justice, au désespoir de sa valeureuse épouse et de ses trois enfants établis à Sherbrooke.
Anne-Marie St-Cerny, une des vedettes du récent Salon du Livre de Sherbrooke, décrit dans son enquête criminelle intitulée Mégantic, les méfaits du ministre Baird: «À la tête du ministère des Transports, John Baird a offert un cadeau très précieux aux sociétés ferroviaires. Faisant totalement fi de nombreux rapports dont celui du Conseil canadien de la sécurité pourtant inquiétant sur une série de déraillements majeurs, Baird a en effet confirmé l’autorité totale des sociétés privées en matière de règlementation de la sécurité ferroviaire au Canada, leur déléguant le pouvoir d’écrire leurs propres règles de sécurité et de s’auto-surveiller. En prime, Baird s’est assuré de bander les yeux de Transports Canada, l’a édenté et lui a lié les mains».
En 2010, Baird passe au ministère de l’Environnement, peu de temps après avoir fait «entendre cette fameuse réplique: Que la cause [du réchauffement climatique] soit liée à l’activité humaine, ça, vraiment! C’est une surprise pour moi.» Il permettra l’acheminement du pétrole en des conditions d’insécurité totale, comme il avait commencé sa carrière comme ministre en Ontario par une croisade musclée envers l’incarnation du “bois mort” de la société: les assistés sociaux et les handicapés!
«Baird a acquiescé à l’une des requêtes les plus pressantes de l’industrie ferroviaire depuis des années: lever l’obligation d’obtenir l’approbation du Ministère pour faire circuler des trains pourvus d’un seul membre d’équipage». Laissé seul pour appliquer les freins du train fou qui allait dévaler la pente le 6 juillet 2013 et causer 47 morts à Mégantic, Thomas Harding est l’objet d’une réelle compassion de la part de l’auteure St-Cerny, comme de la population de Mégantic, satisfaite de l’acquittement de celui désigné bouc émissaire par l’élite criminelle. Sept jours après la tragédie, le successeur conservateur de Baird «Denis Lebel jugera souhaitable de se retirer en douce du ministère des Transports», sans déclencher une Commission royale d’enquête, aussi refusée par ses successeurs, la conservatrice Lisa Raitt et le libéral Marc Garneau.
Baird a rejoint le secteur privé en 2015. Devinez où? Au CA du Canadien Pacifique qui avait payé un demi-million de dollards à World Fuel Services Inc. le 1er juillet 2013 pour le transport du pétrole faussement étiqueté qui explosa à Mégantic et au CA de la société minière Barrick Gold, qui avait poursuivi Écosociété pour la publication en 2008 de Noir Canada d’Alain Deneault. Un dernier mot: si la photo vous a inspiré comme premier réflexe «ah, la burka, chu pas capable», faites vite soigner ce qui pourrait bien être une haine racisée.