Au terme de sa récente tournée latino-américaine, le Canada a conclu une entente de libre-échange avec le Honduras. Cet accord marque l’aboutissement de près de dix ans de pourparlers destinés à favoriser l’implantation d’entreprises canadiennes, principalement minières, dans un pays parmi les plus pauvres et les plus violents d’Amérique centrale.
C’est sous le gouvernement de droite de Porfirio « Pepe » Lobo, riche agriculteur porté au pouvoir en 2009 à la suite d’élections controversées tenues sous un régime putschiste, que cette entente historique a été conclue. L’ancien président, Manuel Zelaya, s’était en effet opposé à l’octroi de nouvelles concessions minières étrangères par un projet de loi qui devait être voté tout juste deux mois après le coup d’État qui l’a renversé, en juin 2009. Faisant fi des préoccupations devant l’arrivée au pouvoir de Lobo, perçue comme une atteinte aux droits démocratiques, Stephen Harper a plutôt été l’un des premiers à reconnaître la légitimité de sa présidence.
De nombreuses organisations de défense des droits humains font par ailleurs état d’une augmentation alarmante de cas d’exécutions et de torture à la suite du coup d’État de 2009 : journalistes, professeurs, militants, syndicalistes et agriculteurs opposés au nouveau régime sont au nombre de ces assassinats sélectifs menés par les escadrons de la mort du gouvernement Lobo. Si ce bilan s’avère des plus inquiétants, Harper a quant à lui réaffirmé son appui au président hondurien, allant jusqu’à le qualifier de « figure importante » en matière de lutte pour le respect des droits de l’Homme.
En fait, ce soutien tous azimuts n’est pas étonnant lorsque sachant que ce qui intéresse principalement le Canada au Honduras, c’est l’exploitation sans ambages de son sous-sol minier. Le pays possède en effet les plus grandes réserves d’or, de zinc et de plomb d’Amérique centrale, et plusieurs de ses minéraux sont toujours inexploités (fer, charbon, cuivre).
Qui plus est, afin de faire la part belle aux investissements canadiens, l’industrie minière du Honduras a considérablement assoupli sa loi minière afin de permettre l’exploitation de ses gisements par des compagnies étrangères. Cette réforme permettra ainsi l’application des normes canadiennes sur son territoire… Et à l’heure actuelle, ces dernières ne comportent aucune mesure quant à la responsabilité sociale d’une entreprise œuvrant à l’étranger. Encore là, ces courbettes n’ont rien de très surprenant, puisque le Canada et les États-Unis ont joué un rôle clé dans la mise sur pied de l’Association nationale des mines de métaux du Honduras, au lendemain de l’ouragan Mitch de 1998, qui avait durement ravagé le pays.
En définitive, il y a fort à parier que l’entente de libre-échange accroîtra les ravages sociaux et environnementaux causés par l’exploitation minière canadienne au Honduras. Sont d’ailleurs déjà observés de nombreux cas de violation des droits des communautés locales, de contamination des cours d’eau et de déforestation sauvage directement imputables au déploiement de cette industrie.
Avant d’entrer en vigueur, toutefois, cette entente de libre-échange devra être ratifiée par les deux gouvernements, et tout indique que le Nouveau Parti démocratique s’y opposera d’abord, compte tenu du piètre bilan du Honduras en matière de respect des droits humains.