La décroissance?

Date : 8 septembre 2014
| Chroniqueur.es : Laurence Williams
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L’idéologie de la décroissance s’inscrit dans une démarche de libération du pétrole. Le principe traduit une volonté d’apprécier la lenteur plutôt que la productivité et la vitesse, où un cadre d’existence complètement différent de ce qu’on connait aujourd’hui est à imaginer: «définir le progrès humain autrement que par le productivisme et le quantitatif».

Le concept de décroissance a été formulé pour la première fois par le démographe Malthus au XVllle siècle, qui prônait la décroissance de la population pour la pérennité de la société moderne. Par la suite, le concept s’est transformé en idéologie économique et politique avec Sadi Carnot en 1834, et plus récemment avec Nicholas Roegen dans les années 1960. Ce dernier a élaboré le concept de bioéconomie en formulant le principe suivant: «le processus économique n’est qu’une extension de l’évolution biologique et, par conséquent, les problèmes les plus importants de l’économie doivent être envisagés sous cet angle».

Au XXle siècle, le concept de décroissance s’articule plutôt autour d’une vision de la réorganisation de la politique moderne, en réponse aux modifications du climat, à la pollution et aux inégalités sociales grandissantes. Selon l’Institut d’études économiques et sociales pour la décroissance soutenable, il est possible de définir le concept comme étant une «politique préconisant la décroissance économique des pays riches et la sortie de l’économicisme, c’est-à-dire de l’envahissement de toutes les dimensions sociales et humaines par l’économie3». L’économiste français Serge Latouche emploie plutôt le terme «d’a-croissance», comme on parle d’a-théisme, puisqu’ «il s’agit d’ailleurs d’en venir à abandonner une foi ou une religion, celle de l’économie, du progrès, de rejeter le culte irrationnel et quasi idolâtre de la croissance pour la croissance1».

Nombreux sont ceux qui associent l’expression «descente énergétique» à la privation, à la souffrance ou au recul social. Au contraire! Il s’agit plutôt d’un retour aux valeurs profondes, d’une occasion de prendre soin de nous en tant qu’être humain et en tant que société. La décroissance donne un regain d’énergie aux communautés en permettant à celles-ci de développer leur créativité et en valorisant le développement personnel plutôt que la productivité. Elle donne aux sociétés le temps de penser aux modes de vie alternatifs appropriés plutôt que de laisser les populations surprises et dépassées par les évènements. L’objectif est donc d’encourager la société à une certaine résilience.

De façon plus concrète, on peut imager la décroissance sous différents aspects. Diminuer les heures de travail pour accorder plus d’importance à la vie familiale, sociale ou communautaire, aux loisirs ou aux enseignements par les pairs est un exemple de pratique qu’adopterait une société en décroissance. Cela inclut aussi l’adoption d’un principe de simplicité volontaire, donc une volonté de bien vivre avec peu de biens matériels en laissant une faible empreinte écologique.

À l’échelle d’une société, la décroissance peut aussi se manifester par l’instauration d’une gratuité du bon usage et un renchérissement de l’usage excessif des services (ex: eau, électricité). Le principe de diminution de la quantité d’énergie de production disponible permet aussi un ralentissement général du roulement des activités économiques. En effet, diminuer l’accès aux énergies fossiles et augmenter la disponibilité des énergies vertes s’inscrivent dans la démarche que l’on appelle «transition énergétique», qui contribue de façon significative à diminuer le rythme de production pour atteindre la résilience locale (autonomie alimentaire, économie locale indépendante et vie politique et communautaire active).

Bien sûr, des modifications importantes du système politique et électoral, communautaire, du système d’éducation, et du modèle économique sont nécessaires pour entamer cette «transition» vers une société libérée du pétrole3. La difficulté demeure dans la concrétisation de toutes ces idéologies. Comment, en tant que ville, peut-on organiser une démarche de décroissance qui soit inclusive, démocratique, participative et surtout, rapide et efficace? Quelles modifications pouvons-nous apporter aux structures existantes pour qu’elles accélèrent le processus de changement social plutôt que d’en limiter l’expansion?

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