Les consultations sur le projet de loi 69 (loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques) se sont tenues cet automne. Ce projet de loi impactera le développement énergétique et les tarifs pour plusieurs décennies. Il s’inscrit dans un contexte où le Québec vise à doubler la production d’électricité d’ici 2050 pour décarboner le Québec mais aussi pour « développer l’économie ».
En effet, le gouvernement a choisi de profiter de la transition énergétique pour attirer ici de grandes industries dites « vertes » par l’octroi de gros blocs d’énergie vendus en bas du coût de production. Et ce ne sont pas des surplus que nous avons promis, mais de l’énergie que nous n’avons pas encore et pour laquelle il faudra augmenter notre production…
Critique 1. Il est injuste que les consommateurs financent la transition énergétique
Le coût des investissements d’Hydro-Québec pour doubler la production énergétique se répercutera sur les tarifs résidentiels. Ainsi, les ménages québécois se retrouveront à financer non seulement la décarbonation des secteurs polluants, mais aussi les projets de développement économique. Cette situation soulève une question d’équité : est-il juste que les consommateurs qui utilisent déjà une énergie propre soient contraints de payer pour ces transformations ?
La transition énergétique devrait être financée par d’autres moyens : contribution accrue du gouvernement, utilisation élargie du fonds d’électrification créé en 2006, participation financière des industries polluantes elles-mêmes.
Critique 2. Risque majeur de choc tarifaire pour les ménages
Le coût des nouvelles productions d’électricité est beaucoup plus élevé que celui du bloc patrimonial, produit à 3 cents le kWh grâce aux barrages construits au 20e siècle. Les nouvelles productions atteindront 11 cents le kWh. Actuellement, le bloc patrimonial couvre 90 % de la consommation d’électricité au Québec, mais avec les projets visant à doubler la production, il ne représentera plus que 40 % d’ici 2050, entraînant une hausse significative du coût moyen par kWh. De plus, une partie de cette nouvelle électricité a été vendue en dessous de son coût de production à de grandes industries, augmentant ainsi les tarifs pour les autres consommateurs afin de combler l’écart. Bien que la loi limite actuellement les hausses à 3 % par année jusqu’en 2026, à partir de 2028, les tarifs pourraient grimper de 5 % à 9 % annuellement avec l’entrée en fonction des nouveaux projets.
Pour limiter ces impacts, plusieurs mesures sont nécessaires : adopter des politiques ambitieuses en efficacité énergétique pour freiner la hausse de la demande, réserver l’électricité bon marché du bloc patrimonial aux ménages pour maintenir des tarifs stables, instaurer une stratégie de lutte contre la précarité énergétique qui touche 1 ménage sur 7, et inscrire dans la loi un plafond de hausse de 3 %, de façon permanente, en complément des autres actions.
Critique 3. Le projet de loi ouvre la porte à la libéralisation/privatisation
Le projet de loi, en plus d’autoriser toute la production éolienne privée, introduit de nouvelles brèches, notamment une diminution de la régulation et la possibilité pour certaines industries de vendre l’électricité qu’elles produisent à des entreprises voisines.Pour protéger l’intérêt public, il est essentiel d’augmenter la transparence et la régulation, et de garantir un contrôle entièrement public de la production et de la distribution d’électricité.
En conclusion
La bataille doit se poursuivre. Nous voulons un vrai débat public sur les choix énergétiques, sur le financement de la transition énergétique, et sur les actions visant à limiter les hausses de tarifs.