L’ouverture de la 32e édition des Rendez-vous du cinéma québécois se fera avec la grande première mondiale du film Miraculum, de Podz (Daniel Grou). Ce réalisateur (19-2, C.A., Les Bougon et Minuit, le soir) offre un film fort de sens, sur un monde qui espère encore un miracle.
À partir d’un scénario de Gabriel Sabourin, acteur dans La Galère et Trauma, le réalisateur du film Les 7 jours du talion, nous montre les tourments de personnages simples aux actions complexes. Tous dépendants : de drogue, d’amour ou d’illusions.
Les grands noms du cinéma québécois (Robin Aubert, Marilyn Castonguay, Xavier Dolan, Anne Dorval, Julien Poulin, Gilbert Sicotte, Louise Turcot, Gabriel Sabourin et Jean-Nicolas Verrault) y livrent des performances plus que remarquables en intensité. On ressent la souffrance (mentale) et la douleur (physique), très loin de la complaisance et très proche de l’humanité. Effectivement, il ne fait pas toujours bon vivre en ce monde actuel.
Ce film choral en témoigne par quatre histoires différentes qui s’entrechoquent. Celle d’une infirmière en couple avec un électricien, tous deux témoins de Jéhovah convaincus. Lui niant l’évidence de sa mort certaine et elle, qui se dévoue au seul survivant d’un écrasement d’avion. Comment ne pas douter de l’existence de son Dieu? Aussi, un couple illégitime de sexagénaires tentant de rendre à leur passion le bonheur qu’ils méritent. Est-ce que l’amour est encore possible à cet âge? Un autre couple, distant de leurs émotions, qui est mené par leur dépendance distincte au jeu et à l’alcool. À partir de quand le naufrage devient-il inévitable? Et enfin, le retour brutal d’un exilé pris dans une course vers la rédemption d’un geste irréparable. Est-ce que la désillusion est un fait admissible ou une volte-face légitime?
Le spectateur se retrouve malgré lui comme un voyeur, imprégné par le malaise, curieux du dénouement, espérant le meilleur.
Pour Julien Poulin, qui joue Raymond, la tendre moitié du couple sexagénaire, un film «si bien écrit, avec un bon directeur et de la bonne compagnie», c’est la recette gagnante. Même si M. Poulin ne croit pas aux miracles, il croit à la démarche miraculeuse en se disant que si l’on veut que cela arrive, il faut embarquer! «Podz a beaucoup de considération et lorsqu’il nous tend la main, on s’abandonne», confie-t-il en entrevue. Un abandon bien senti qui donne énormément d’intensité aux scènes.
Y croire, c’est facile puisque le film prend tout son sens par la signature de Podz. Par les prises de vues originales rendant toute la dureté du travail de passeur de drogue par les dessous d’une porte de toilettes, comme si on y était. Les changements de focales pour nous faire saisir à tour de rôle les visages qui s’expriment. Ajoutez des incursions lentes et mobiles de la caméra pour nous faire pénétrer dans une scène, tel un invité invisible qui s’infiltre subtilement pour ne rien manquer. Tout ce doigté de réalisation qui nous rend témoins de situations en déclin ou de vies qui s’élèvent.
Du vrai, Du cru. Qui demandent l’attention du spectateur à la fois pour jouir des subtiles transitions et des clins d’œil qui relient le dialogue aux images. Bien que la parole laisse souvent place au non-verbal.
En entrevue avec Entrée Libre, Podz précise que tous les moyens sont bons pour laisser parler l’image. Si c’est intéressant pour lui, il soupçonne et souhaite que cela le soit pour le spectateur. Et il croit aux miracles dans sa forme la plus simple. «Parce qu’avec toute la merde, cela en est déjà un qu’on arrive à sourire quand même!», lance-t-il. Est-ce qu’il appréhende une réaction de la part de la communauté Jéhovah? Quand on pose des questions, il est normal, selon lui, que les gens réagissent.
La force du film se trouve dans l’écho de nos propres choix. Avons-nous le courage d’améliorer notre destin? De nourrir nos passions? De croire en l’amour?
Miraculum sort en salle le 28 février.