Si toi (je me permets de te tutoyer pour alléger le texte), responsable des Ressources humaines ou entrepreneur en tout genre, tu te demandes pourquoi les jeunes ne se présentent pas en entrevue ou au travail (phénomène appelé « ghosting » : faire le mort, ne pas se présenter, disparaître…), ce texte s’adresse à toi.
À prendre avec un grain de sel. Et une tisane à la camomille.
Tsé, Darwin
Selon la Théorie de l’évolution des espèces de Charles Darwin, les générations s’adaptent aux (nouvelles) conditions adverses pour survivre. Il en va de même pour les individus dans la société : ils adoptent des comportements (nouveaux) pour survivre en limitant les actions qui consomment de leur énergie inutilement.
Contrairement à ceux des générations précédentes (dont la mienne), ils changent DE patron plutôt que d’essayer de changer LE patron. Le patron (toi !) ne change pas. Ou très peu. Et très lentement si c’est le cas.
Le ghosting, c’est ton invention
Tu le pratiques encore chaque fois que tu écris « Seules les personnes dont la candidature sera retenue seront contactées. » ! Du ghosting conjugué au futur.
Combien de fois je n’ai pas eu de nouvelles d’employeurs même après avoir passé une entrevue ! Ghosting ! Je comprends que je puisse avoir été le ‘deuxième meilleur candidat’ et que tu voulusses (tant qu’à être dans l’imparfait. Héhé !) prendre le temps d’essayer « le meilleur », prendre quelques semaines pour l’évaluer et peut-être me revenir si toi ou l’autre changez d’idée … mais tu aurais pu me le dire au lieu de me laisser mijoter dans mon jus.
À mes débuts, après l’université (et avant l’internet), pour postuler un emploi il fallait lire tout ce qu’on pouvait sur l’entreprise, faire son résumé sur du ‘beau papier’, composer une lettre de présentation personnalisée, mettre le tout dans une enveloppe (blanche de préférence) et idéalement aller la porter en personne ou la poster. Bref : du temps et des dépenses. Pour un taux de réponse entre deux et trois pour cent qui, la plupart du temps, se limitait à un accusé-réception sans âme. Et sans suite.
Des indélicatesses aussi
Du genre : planifier une entrevue à 7 h 30 le matin à deux heures de route d’ici (en hiver) parce que le patron veut impérativement faire ça « avant de commencer sa journée ». On ne m’a pas offert de café ni même un simple verre d’eau pour cette entrevue avec cinq cadres … qui sirotaient leur café en improvisant des questions à la lecture de mon résumé qu’ils n’avaient visiblement pas vu auparavant.
L’exception exceptionnelle
Il m’est arrivé une seule fois qu’une entreprise me rembourse les frais de déplacement à une entrevue en dehors de ma ville. Une seule fois. Au même taux que pour leurs employés. Au tarif actuel, ce serait 80 $ pour un aller-retour Sherbrooke-Drummondville. Un chèque remis en main propre au début de l’entrevue : une belle entrée en matière.
Devant mon étonnement, le patron m’avait dit « On veut les meilleurs, on est prêts à payer pour les avoir et ce n’est pas 80 $ multipliés par trois ou quatre candidat(e)s de l’extérieur qui vont faire une différence. » Je n’avais pas eu le poste mais j’y avais décroché un emploi quelques années plus tard.
La job faussement permanente
Tu n’as jamais embauché un(e) employé(e) sur un « poste permanent » pour le mettre dehors dès que l’étape finale d’un premier projet était atteinte ? D’autant plus choquant si tu as débauché la personne d’un autre poste (vraiment) permanent ailleurs. Cas vécu. Ne sois pas surpris qu’un(e) employé(e) te quitte avant la fin. Avant que toi, tu le\la « flushes ».
Le marché s’adapte
Et le marché, pour tes employé(e)s présent(e)s et futur(e)s, c’est maintenant chacun(e) pour soi. Comme pour toi depuis longtemps. Parce que Darwin finit toujours par avoir raison.
P.S. : j’ai passé sous silence les vacheries (les vraies !) observées plus d’une fois au cours des années dans différentes organisations. Comme d’appeler le patron actuel d’un(e) candidat(e) pour soit-disant « prendre des références » et ainsi le\la mettre en brouille avec son patron. Si un patron fait ça, sauve-toi à toutes jambes. Sans prévenir !